« Psychopaths are not crazy. They are fully aware of what they do and the consequences of those actions. »
L'esprit est un dédale infernal. Un labyrinthe illisible de portes et de couloirs, de souvenirs épars. Il est si simple de s’y trouver emmuré vivant, de s’y consumer à force de réclusion. L’identité tient à bien peu de choses lorsque personne ne la confirme.Mais l’esprit est également un plateau de jeu où les pions s’avancent à l’abri des regards, un huis clos redoutable et l’échiquier favori d’âmes aux sombres désirs. Pour ces bourreaux-ci la folie n’est pas un dénominateur commun. Certains sont infiniment conscients des actes qu’ils convertissent en signature. D’autres veulent immortaliser leur œuvre, présenter un message intemporel. Les plus insaisissables n’agissent que par curiosité. A chaque visage correspond un profil, un dessein à intérioriser. Si la démence ne les leste pas seules leurs habitudes peuvent les signaler. Or distinguer la volonté au-delà de l’horreur est l’activité des agents de la Behavioural Analysis Unit, section du FBI menée par Jack Crawford.« The mathematics of human behaviour... all those ugly variables. »
Mais lorsque la Pie Grièche du Minnesota emporte une nouvelle victime l’analyse ne suffit plus, le cadre est dépassé. Quelqu’un doit infiltrer l’esprit du tueur pour cartographier ses failles de l'intérieur. L’hameçon est lancé. Will Graham est sorti de son amphithéâtre pour rejoindre les scènes de crime en tant que consultant. L’homme ne pense pas comme les autres. Son empathie anime les preuves jusqu’à les rendre vibrantes d’émotions. Celles du meurtrier qu’il incarne s'insinuent en lui. C’est une prouesse à double tranchant ainsi qu'un équilibre fragile. Son identité s’effrite, elle se teinte de couleurs ne lui appartenant pas. Pour ne pas se perdre il lui faut raffermir sa prise sur la réalité ; s’accrocher de toute sa poigne à un fil d’Ariane providentiel. Hannibal Lecter devait incarner cette stabilité. Alana Bloom adresse cette requête auprès de Crawford pour le préserver. Une équation risquée. Le psychiatre est amateur de raretés et Will est un diamant brut ne demandant qu’à être taillé par sa main d’orfèvre. Pourtant le diable se dissimule sous les traits d’un homme respectable ; le poison de ses intentions est parfaitement muselé. Ses actes sont soignés, le moindre geste est calculé pour n’être que réconfort. Lecter sait séduire le monde et le faire graviter autour de sa poigne de velours. Le FBI accorde son entière confiance au thérapeute tandis que son emprise sur Will s’affirme.
Bien vite les frontières du réel se font de plus en plus troubles pour Will. Son imagination charge le barillet d’une arme prête à faire feu en des directions incertaines. Son esprit se retourne contre lui, l’implosion est proche ; Hannibal la retarde autant qu’il l’alimente afin de maintenir son contrôle. Le profiler souffre d’une encéphalite. Or, Lecter fait en sorte que l’information n’effleure aucun esprit. L’instabilité de Will devait perdurer aux yeux du monde. C’est un jeu qui se joue au détriment du principal concerné et les suspicions à son encontre naissent. L’image de l’Eventreur de Chesapeake se superpose trop justement à celle de Will, lui-même ne sait plus distinguer son reflet véritable. Le glas est sonné par la disparition d'Abigail Hobbs, la fille de l'homme qu'il avait dû abattre, sa responsabilité.
Tous pensent que l’agent a été brisé par l’horreur d’une exposition forcée. Personne ne suit la piste désignée par un homme usé, tant coupable que victime. Personne ne suspecte Hannibal Lecter. Will Graham est incarcéré. Libéré du joug d’Hannibal la réalité se décante peu à peu. Grâce à la thérapie de Chilton l’agent se souvient de la nature réelle de ses pertes de conscience. La confusion dont il se débarrasse ressemble aux fils coupés d’une marionnette. Ainsi à sa sortie de prison il n’est plus le même homme. Will est résolu à causer la perte du docteur Lecter quand bien même ce chemin le conduirait vers la compromission, au sein d’une danse avec le diable en personne. L’obscurité pavant ses intentions l’isole plus encore ; Alana est déchirée. Cette blessure à vif nécessite un baume, un refuge où le deuil est possible. Hannibal, figure de confiance, est tout désigné. Jack quant à lui semble trop émotionnellement impliqué. Pris entre deux feux, la maladie de sa femme et le retour d'une recrue si longtemps présumée morte. Ses doutes semblent encore incertains.
Quelle place allez-vous tenir sur cet échiquier ? C'est à vous qu'il revient de le définir.